
Comment le règlement SEPA Instantané risque d’ébranler les marges des banques européennes
L’entrée en vigueur imminente du règlement SEPA Instantané crée une onde de choc dans les coulisses de la finance continentale. L’obligation de traiter les paiements en euros en moins de 10 secondes, 24h/24 et 365 jours par an, force les établissements à repenser leur modèle économique – avec des conséquences immédiates sur leur rentabilité.
La quadrature liquiditaire
D’après une étude RedCompass Labs, 47% des banques européennes anticipent des pertes de plusieurs millions d’euros en intérêts. En cause : le mécanisme de préfinancement des comptes TIPS (TARGET Instant Payment Settlement) qui les contraint à immobiliser des liquidités hors des heures d’ouverture de TARGET2. Un capital dormant qui ne génère plus de rendement via les prêts ou placements, tandis que la suppression prochaine du plafond de 100 000 € par transaction accroît l’incertitude.
« Imaginez un samedi soir avec des virements instantanés à haute valeur qui s’accumulent, lance un intervenant. Sans accès à TARGET2 jusqu’au lundi matin, le risque de rejet de paiement devient critique ». Un casse-tête opérationnel qui explique pourquoi 93% des institutions jugent la gestion des liquidités « préoccupante ».
Course contre la montre technologique
L’enjeu dépasse la simple mise en conformité. Avec 77% des banques confrontées à une hausse des fraudes et 54% à un pic des rejets de paiements, la modernisation des infrastructures devient vitale. Deux tiers des établissements investissent dans l’IA pour réduire les faux positifs lors des contrôles de sanctions, tandis que 46% renforcent leurs outils de détection en temps réel.
Mais la véritable révolution réside dans l’abandon progressif des systèmes legacy. Volante Technologies révèle que 23% des banques considèrent leurs anciennes plateformes comme le principal frein à l’adoption règlement SEPA Instantané. La migration vers ISO 20022 et le traitement continu des transactions exigent des investissements lourds – un défi pour les acteurs historiques face à l’agilité des néobanques.
Stratégies de contournement et nouveaux risques
Face à l’érosion programmée des revenus, les établissements explorent des parades :
- Accords bilatéraux entre banques pour limiter les expositions
- Optimisation des seuils de liquidités via l’apprentissage automatique
- Monétisation de services annexes (API de trésorerie instantanée, analyse prédictive)
Pourtant, la pression réglementaire masque un bouleversement plus profond. En alignant les frais sur les virements standards, le règlement accélère la démocratisation des paiements instantanés – et avec elle, l’exigence croissante des clients corporates. Un changement de paradigme qui pourrait redistribuer les cartes au profit des pionniers de l’expérience client.